AgTech : maîtriser les données pour améliorer les pratiques agricoles

par OUTSCALE
AgTech : maîtriser les données pour améliorer les pratiques agricoles

Le recours aux nouvelles technologies est indispensable pour permettre aux agriculteurs de contribuer à la lutte contre le réchauffement climatique et d’améliorer la rentabilité de leurs exploitations. Si les données seules ne permettent pas de créer de la valeur, leur traitement peut permettre de développer des services digitaux innovants pour faire évoluer les pratiques agricoles et mieux informer les consommateurs. Comment le secteur peut-il tirer profit de ces données tout en conservant la maîtrise de leurs usages ? Éléments de réponse avec Sébastien Picardat, directeur général de la société Agdatahub.


Contrairement aux idées reçues, le secteur agricole est un secteur très technophile. Près de 80 % des agriculteurs utilisaient Internet en 2016, selon un rapport du ministère de l’Agriculture qui pointait également une forte progression de l’utilisation d’applications professionnelles agricoles. “Les filières animales ont été les premières à utiliser le minitel dans les années 1980 pour assurer la traçabilité des bovins et faire des déclarations de suivi des animaux. C’est donc loin d’être nouveau !”, rappelle Sébastien Picardat, directeur général de la société Agdatahub, qui opère notamment la plateforme d’échange de données agricoles API-Agro

Au sein de ce secteur économique stratégique, des milliers de produits transitent d’un acteur à un autre chaque jour. Chaque année, ce sont ainsi plus de 18 millions de mouvements d’animaux qui sont saisis et échangés en France. L’enjeu est donc de faire suivre les informations liées aux productions et les millions de données produites quotidiennement. 

Par ailleurs, de nombreux objets et outils connectés collectent des données qui vont pouvoir aider les exploitants agricoles dans leurs tâches quotidiennes. Les entreprises de l’AgTech ont la lourde tâche de compiler et de valoriser des données extrêmement hétérogènes. Grâce à ces données, il est possible de suivre l’état de santé du bétail, d’ajuster l’irrigation des parcelles agricoles, de créer des modèles prédictifs pour réduire les risques sanitaires ou encore de surveiller la qualité du sol. Les usages sont donc très divers. 

Prises individuellement, les données d’une exploitation agricole n’ont pas de valeur. C’est leur massification qui permet de leur donner du sens. L’accès à ces données est par ailleurs primordial pour la recherche et le développement des filières agricoles. Les instituts techniques agricoles et les chambres d’agriculture s’y sont d’ailleurs intéressés très tôt, dès 2014. Grâce à l’open data, les données agricoles sont rendues disponibles à tous, ce qui permet de favoriser l’innovation : les créateurs de solutions numériques peuvent ainsi tester de nouveaux produits ou prototypes des outils d’aide à la décision par exemple. 

Mais comment interconnecter l’ensemble des acteurs du secteur agricole en France, c’est-à-dire les 420 000 exploitations agricoles avec leurs 85 000 partenaires, essentiellement des TPE et PME ? Certains se situent en amont de l’exploitation agricole : c’est le cas des distributeurs d’engrais, de semences, de produits phytosanitaires, d’aliments du bétail, mais aussi des vétérinaires par exemple. D’autres se situent en aval pour acheter les productions agricoles comme les coopératives, les négociants, les industriels agroalimentaires ou encore les abattoirs. Les sources d’information sont donc multiples et la quantité de données massive. C’est la raison pour laquelle il est primordial de qualifier ces données pour les rendre exploitables. Il faut également protéger les données afin qu’elles soient anonymisées en cas de réutilisation. 

Depuis 2019, la solution SaaS API-Agro permet de sécuriser les échanges entre tous les acteurs agricoles et startups de l’AgTech pour émettre les données et les utiliser en toute sécurité. 

 

Valoriser les données agricoles 

Comment les agriculteurs peuvent-ils céder leurs données tout en restant maîtres de leurs informations ? Ceux qui partagent leurs données regrettent bien souvent de ne pas avoir plus de visibilité sur les usages qui en sont faits. Il est indispensable que les acteurs du secteur agricole aient un droit de regard sur l’utilisation des données qu’ils produisent et qu’ils puissent choisir avec qui ils les partagent. Cette question de l’usage des données est particulièrement sensible, car l’indépendance de l’agriculteur vis-à-vis des grandes entreprises de l’agrochimie et du machinisme agricole notamment, en dépend. En effet, si les données qu’il produit à l’aide des machines agricoles qu’il utilise ne lui appartiennent pas et s’il est obligé de les acheter par exemple, son indépendance est compromise. 

Pour répondre aux besoins de maîtrise des données, l’entreprise Agdatahub a mis au point une panoplie de solutions de consentement avec les éditeurs logiciels du secteur. Elles permettent aux agriculteurs d’accorder un consentement à leurs partenaires habituels pour un usage et une durée définis préalablement à l’échange des données. L’agriculteur peut ainsi choisir avec qui il partage ses données, à quoi elles vont servir et la période pendant laquelle le consentement est donné. 

Ces solutions comprennent trois modules : d’abord un module d’identité numérique des exploitations agricoles qui va permettre de garantir l’identité des contractants. Ensuite, une panoplie de gestionnaires de consentement pour les agriculteurs. Et enfin un routeur de consentements qui va se connecter aux gestionnaires du secteur pour centraliser l’ensemble des consentements accordés par les acteurs agricoles sur un portail unique, Agri-Consent, dont l’accès sera gratuit pour les agriculteurs. 

Pour Sébastien Picardat, il est primordial que chaque agriculteur reste maître de l’usage de ses données : “Aux États-Unis, certaines données sont revendues à des négociants internationaux qui agissent sur les cours du blé à Chicago par exemple. Grâce à cette visibilité et à la consolidation sur l’ensemble des continents, ils peuvent influencer les cours. L’exploitation des données se fait alors au détriment de l’agriculteur et, à la fin, c’est son chiffre d’affaires qui est impacté”. 

 

Innover pour améliorer la productivité

Grâce aux technologies et au Cloud, de nouvelles possibilités de valorisation des données s’offrent aux agriculteurs. S’il convient de rappeler que les données en tant que telles ne créent pas de valeur, leur utilisation par des services peut permettre d’améliorer la productivité et la rentabilité économique et environnementale des exploitations agricoles. Les données, une fois exploitées, peuvent aider les agriculteurs et les éleveurs à améliorer leurs revenus en réduisant leurs charges ou en dégageant des revenus supplémentaires. Ces services à destination des agriculteurs, qui peuvent prendre la forme d’outils d’aide à la décision par exemple, contribuent à améliorer les performances techniques, environnementales et sociales de la production agricole. Grâce à ces outils, il est aussi possible de limiter le recours aux produits phytosanitaires pour minimiser l’impact environnemental ou sanitaire de la production. 

Les agriculteurs peuvent également monétiser leur contribution à la séquestration du carbone. La méthanisation ou encore la production d’énergies propres leur permettent alors d’obtenir une source de revenus complémentaires en échange d’un service rendu à la planète. 

Ces données peuvent également permettre aux agriculteurs de valoriser leurs productions grâce au service de traçabilité à destination du consommateur final, selon le directeur général d’Agdatahub : “Quand vous allez au supermarché, dans votre épicerie bio ou sur le marché le dimanche, vous allez acheter des produits qui respectent un cahier des charges, qui ont une origine locale… et vous êtes prêts à les payer plus cher”. Le numérique permet aussi de recréer le lien entre l’agriculteur et le consommateur. “Quand vous avez un code-barres et que sur votre produit vous voyez la ferme de l’agriculteur et le lieu de production, vous vous rendez compte qu’il y a quelqu’un derrière”, ajoute Sébastien Picardat. Autant de nouveaux usages et de services pour créer de la valeur à partir des données rendues disponibles. 

 

L’ambition européenne 

Le secteur agricole est un secteur hautement stratégique, au même titre que la santé ou les infrastructures de transport, car il permet d’assurer la sécurité alimentaire de l’ensemble de la population. Or, à mesure que le secteur se digitalise, les mastodontes américains et chinois cherchent à capter le maximum de données agricoles mondiales. Les données qui sont stockées chez un fournisseur des services soumis aux lois américaines sont ainsi soumises aux réglementations extraterritoriales à travers la loi du Cloud Act. Il existe donc un risque juridique majeur. “On l’a vu avec la COVID-19 et le vaccin, quand on n’a plus de capacité d’usines de production, nous sommes dépendants de puissances étrangères, met en garde Sébastien Picardat. Pour l’agriculture et pour nourrir les 500 millions d’Européens, il nous semble primordial de préserver nos capacités de production agricole et de conserver les outils de l’AgTech avec des technologies européennes afin de ne pas dépendre d’autres états”. La question de la souveraineté française et européenne est donc un enjeu crucial. Elle fait également partie des critères de choix lorsqu’il s’agit de s’associer à un partenaire technologique.

 

Pour accélérer la transition numérique des 10 millions d’exploitations agricoles de l’Union européenne, Agdatahub – qui se positionne comme un acteur structurant de l’AgTech au niveau européen – prévoit de déployer son activité dans les autres états membres de l’UE qui ne disposeraient pas encore de plateformes d’échange au stade industriel. La jeune pousse française souhaite faciliter les échanges entre voisins européens grâce à une standardisation des données. L’entreprise participe à trois grands projets européens de recherche autour du numérique agricole (Invite, Tech Care et SmartAgriHubs). En début d’année, Agdatahub a rejoint la fondation GAIA-X en tant que “Day-1 Member”. Avec ses partenaires technologiques (Orange Business Services, Dawex, 3DS OUTSCALE), Agdatahub soutient le principe de la création d’un groupe de travail dédié à l’agriculture au sein de la fondation GAIA-X, pour traiter notamment des questions d’identité numérique des exploitations agricoles et de standardisation des données pour faciliter l’interopérabilité entre les plateformes déjà existantes en Allemagne, aux Pays-Bas et en Belgique. Objectif ? Garantir l’indépendance numérique de l’agriculture européenne.

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